L’appréciation de Jacques Parisse sur l’exposition de peinture aux Chiroux

Bibliographie

Après l’excellent ensemble Beunckens-Andrien-Dacos, voici tout autant remarquable d’unité, de force et de puissance Rudy Pypers et Jo Rome et ce n’est pas un hasard si ces deux expositions sont parmi les meilleurs que la jeune galerie de la vénérable Société royale des Beaux-Arts nous aura montrées pour sa première saison : ces artistes qui avec Musin travaillent de l’intérieur l’Académie où ils enseignent dans le sens d’une « remise à l’heure d’aujourd’hui » ont en commun le goût d’un certain réalisme qui nous invite à mieux voir le monde quotidien sans succomber à un souci trop systématique d’expressivité qui pour beaucoup n’est plus qu’une « attitude » plastique. Chez Pypers et chez Rome la peinture témoigne tout autant de ce qui leur est arrivé que de ce qui est arrivé aux autres. En quoi leur art nous sollicite d’autant plus qu’il leur faut du courage et du masochiste désintéressement pour dire en très grand et très fort ce qui chez d’autres n’est parfois que chuchotement d’esthètes à l’usage des appartements bourgeois. Rudy Pypers ne peint pas le calme mais la tempête pas le repos mais le mouvement plutôt il cherche à définir une simultanéité, un état précaire, fragile entre le repos et le mouvement. Que ce soit dans le Couple voluptueux, dans Le Constat, dans La Place Cathédrale ou dans le déversement hétéroclite de la très belle Voirie le mouvement est suggéré par la superposition d’instantanés, d’autant plus dynamique qu’il y a toujours quelque part dans l’œuvre un objet ou un être au repos, badaud ou acteur en attente. comme dans les Pêle-mêle ce sont, peints avec une sorte de rage nerveuse et en couleurs, des mouvements de la vie du peintre mais où nous pouvons au prix d’insensibles mutations, trouver quelque chose qui nous concerne.

Plus secret l’art de Jo Rome, plus susceptible d’interprétations, plus évocateur que narratif. Au total une peinture assez énigmatique qui se défoule dans des sculptures dont la blancheur de poétiser par le volontaire grotesque des formes pour choquer mais aussi émouvoir. Opposer dans une toile un mur immense de cloître ou de prison et un enfant qui joue sur son escarpolette. Dire « Cela n’a pas fait mal » quand le père et son enfant semble attendre nous ne savons quoi dans un couloir d’hôpital c’est évoquer à la fois l’absurde de la vie et l’immense solitude qui en est souvent la plus discrète et la plus poignante manifestation. Du sourire aux larmes il y a un pas est un pas seulement dans l’art étrange, si peu explicite de Jo Rome. Je voudrais être plus long sur cette belle, sur cette grande exposition. À mon goût, j’en ai trop peu parlé mais je m’en souviendrai longtemps. (Galerie de la Société royale des Beaux-Arts, 7, rue des Croisiers).

Par Jacques Parisse

Exposition : 7, rue des Croisiers : Rudy Pypers – Jo Rome

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