Les expositions de peinture contemporaine belge, par Jacques Parisse

Jo Rome à la galerie Valère Gustin in La Wallonie, 1980

C’est ici même, chez Valère Gustin que Jo Rome avait exposé en mai 1977, une suite de dessins-collages dans lesquels il avait intégré comme pour un ultime hommage des fragments de photos, de dessins, de documents familiaux écornés, noircis, jaunis par l’incendie qui avait ravagé sa maison. Du drame, il avait fait œuvre. Cette exposition était comme une page tournée de sa vie, son entrée définitive dans la vie de l’homme.

Voici aujourd’hui 16 toiles très récentes dans lesquelles la nostalgie de l’enfance semble prétexte à des souvenirs heureux. Il a en quelque sorte gardé en peinture la technique du collage : la toile est narrative mais d’une narration certes, pour l’artiste, tous ces tableaux dans le tableau sont reliés par un fil conducteur qu’il nous faut dégager. Mais cette démarche correspond exactement – Proust l’a admirablement démontré – à la démarche chaotique de la mémoire qui enchaîne les moments retenus, qui bouleverse les données du temps et les indications d’espace. Mais bouleverse les données du temps et les indications d’espace. Mais soyez sans crainte, tout se tient, le hasard ne conduit pas la composition qui est soutenue par un métier savant où se rejoignent le dessinateur, le peintre qui aime les belles matières lisses, poncées ou crayeuses et le coloriste. Du côté des sujets, Jo Rome n’a pas besoin de satans lointains, moins encore d’excursions dans le roman-feuilleton et le courrier du cœur : sa maison, son enfance et ses jeux la vie rurale, les premières émotions des l’adolescence, les simples joies domestiques alimentent et nourrissent une œuvre solde et tendre, moderne dans la facture mais si permanentes dans les situations et les sentiments qui s’y déroulent. Laissons donc nos masques au vestiaire, oublions les écoles, les courants ; laissons-nous porter par cet art qui nous concerne par sa forme expressive et par sa profonde humilité. Tous les chemins, cette quinzaine, devraient mener à Rome. Ne passez pas à côté de lui : Jo Rome, sans tambour, ni trompette, sans pompe, mais avec des œuvres, est un grand peintre.

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