De bec et de plume, Jacques Parisse, 1987

Jacques Parisse in De Bec et de plume. Liège, éd. RTBf 1987

(Chronique RTBf, 17 avril 1980).

En mai 1977, Jo Rome avait exposé chez Valère Gustin une suite de remarquables dessins-collages. Il retrouve cette galerie avec seize peintures acryliques récentes.

Protégé des modes dont il est informé mais qui ne l’intéressent pas, Jo Rome, au contraire de beaucoup d’autres, n’a jamais fait ses classes dans l’abstrait. Il raconte simplement, par les moyens de la peinture, des sentiments permanents, universels et sans fadeur. Ne comptez donc pas sur lui pour parler avec des sanglots dans le pinceau des joies du couple parfait, des maternités suaves. Il laisse cela a d’autres qui avec des bons sentiments font du gros argent. Jo Rome c’est la sincérité et la tendresse; les autres ne sont que « confort et chaleur ».

La rigueur d’une construction traitée souvent en puzzle et qui correspond à la démarche sautillante du souvenir qui plane, prend et décante, une belle matière mate ou brillante, « léchée » ou nourrie, une stricte organisation des plans avec, pour agrandir l’espace intérieur – espace physique et espace moral- des portes et des fenêtres ouvertes qui prolongent le regard et lui permet de pénétrer l’intimité…

La tendresse. Regardez et dites-moi s’il n’y a pas là quelque chose qui vous touche et qui vous parle de vous-même : la fête au village avec le carrousel coloré comme un blason, la course cycliste de la kermesse sous les yeux de deux enfants revêtus de gros paletots qui doivent durer plusieurs hivers. C’était la guerre! Ou cet autre tableau : l’enfant devant sa petite collection d’œufs d’oiseaux, ou la préparation de la communion solennelle : dans le grand vaisseau glauque de l’église, les catéchisés, écrasés par la solennité du moment, oublient jusqu’à leurs rires… Mais ces rires, ces cris, ils les retrouvent sur le terrain de football improvisé dans une prairie…

L’âge d’homme a aussi inspiré à Jo Rome quelques œuvres sereines, heureuses : il se promène lentement dans sa maison, il regarde, il peint le lit, la banale armoire de la cuisine, la vieille porte qui s’ouvre sur la cave. En tait, rien que du banal mais un banal auquel sont accrochés un contexte sentimental, des souvenirs quotidiens, des moments de la vie. Comme son œuvre, Jo Rome ne se paie pas de mots. C’est un artiste « d’intérieur ». Une exposition à voir lentement, à petits pas, avec gourmandise.

Jo Rome : romantique

La Libre Belgique, 22/04/1980.

Voguant entre le pop-art et le collage, Jo Rome se renouvelle ici par la peinture tout en demeurant fidèle à lui-même.

C’est-à-dire qu’il dessine et peint ses collages sur la toile, réalisant une sorte de patchwork pictural aux couleurs vives et savamment ordonnées et en donnant de-ci, de-là l’impression de matière en relief par un travail patient de la peinture.

Mais aussi, et peut être est-ce le plus étonnant, on découvre dans les toiles plus simples un artiste romantique et intimiste qui se souvient des carrousels dorés de l’enfance ou des premières communions écrasées par les statues de la foi.

Dans cet univers personnel où le souvenir rejoint le présent et prend figure de symbole, Jo Rome a d’abord tablé sur le sens de ses œuvres, la couleur n’étant qu’une aide précieuse qui accentue encore son romantisme.

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